30 octobre 2013

55ème Biennale d'art contemporain (Il palazzo enciclopedico)

Dernières lueurs encyclopédiques, le recours anthropologique
Bien sûr c'est parfois légère écume et, débarquant de leur gondole, un Tintoret ou un Carpaccio seraient probablement décontenancés par quelques gribouillis mais heureusement ça n'arrivera pas. Enciclopedico, dans toutes les langues (hormis arabe, hébreu, japonais, chinois mais ils comprennent).
Cette année le thème de la Biennale est "Il palazzo enciclopedico" (dénomination justement exhaustivement compréhensible dans toutes les langues occidentales) et c'est une question passionnante et nécessaire : une tentative de repérer cette inspiration dans les systèmes de connaissance et de représentation dans le temps même où Google se propose comme cerveau du monde.
Rapidement, très rapidement et injustement, j'avancerai que dans toutes ces propositions, celles en tout cas qui se sont vraiment affrontées à la question, deux types de perspective apparaissent :
- celles d'une ontologie essentielle et mystérieuse (au sens d’un rituel) de la nature,
- et celles d'un effort vain, éprouvant et humble de constituer de la connaissance au travers de communautés de projet.
Mettons de côté les expériences concrètes de totaliser la connaissance : au mieux, c'est daté, Pic de la Mirandole, Leopardi ( d'un temps où le savoir paraissait unitaire et totalisable). Jung et Steiner qui

28 octobre 2013

Venise, capitale du Monde (des images)


En tout lieu du monde on peut en saisir la pulsation, l'écho mais certains exposent cette lisibilité avec un rendu plus vibratile.
Paquebot se mirant en Saint-Marc
Vous le dirai-je de Venise ? Cité-État qui jusqu'au XVIIIe (jusqu’à Napoléon) a été le centre bruissant et puissant de l'échange avec l'Orient, lieu d'une convergence jalouse du luxe, de la puissance et des arts. Un long assoupissement ensuite aplani par les marées touristiques, venues se prosterner vers un message de beauté qui leur renvoie l'inanité de leur passage. Stupides comme toute horde mais ne se trompant pas d'adresse (de mythe). De même que sous la Tour Eiffel, le passage des nations, le bruit des langues nous y disent en un instant l'état géopolitique des apparitions, le style des classes moyennes planétaires, et encore le moment des technologies et des attitudes de représentation. Ils ne voient pas l'habitant, l'habitant les frôle, car il serait épuisant, stérile et perturbant de les considérer personnellement comme étrangers individuels.
À Venise, je dirais qu'en moyenne journalière il se prend 500000 photos. En certains endroits, il n'est pas possible de prendre une photo sans être soi-même pris en photo, une orgie numérique assez rafraîchissante. Tout a été dit et représenté à

21 octobre 2013

Au théâtre le temps ne se mesure plus

Chacun des spectacles du Théâtre de la démesure accomplit et participe d’un irremplaçable moment du théâtre.
Temps de pose est le dernier, par nous vu en sa dernière représentation de Montreuil (93).

Voyage du Grand Médiateur Culturel dans l'univers des formes
Il s’agit de déployer, d’interroger et de savourer ce que produit chez nous, spectateurs, le voyage d’une forme, saisie, arrêtée, élaborée une fois par un artiste. Les mots qui commentent ce propos sont multiples car la Démesure du projet est de nous en faire partager l’inépuisable et inassignable ressource. Dans le flux du réel, un artiste prétend faire arrêt, à partir d’une pose qu’il suppose pouvoir adresser à un spectateur, destinataire, commanditaire à venir. Le théâtre, par son commerce de signes et sa question d’un sens partagé, est le lieu privilégié de cet examen.
Évidemment c’est désopilant car cette saisie est à chaque fois une caricature d’elle-même. L’artiste comme imposteur qui n’atteindra jamais le Graal qu’il vise. La pose est une prédation, un sacrifice, un arrachement, un don et les traditions « sauvages-naïves » étaient bien averties de s’interroger sur le risque du portrait photographique ou religieux, tant pour le « saisi » que pour le « regardeur »...
photo Nadar - ©RMN
Chacun de ces moments : l’autoportrait de Gustave Courbet en désespéré, Sarah Bernhardt par Nadar, Le Caravage en sa commande christique, Yves Klein dans le vide ou encore la performance comme action interrogative sont jubilatoirement dépecés, raboutés, mais très respectueusement soutenus. On y entend les heures d’improvisation, l’appropriation des œuvres, le scalpel de la mise en scène finale et toujours cette signature de l’incontournable prise en compte de la tradition du théâtre et du sens de l’instant théâtral. Chaque acteur, chaque spectacle est un héritier et cette compagnie le garde en scène à tout instant. S’y conjuguent donc de manière très rare une absolue légèreté, générationnelle, et une interrogation démesurée, sans âge et donc d’avenir.
Je n’oublierai pas de revenir vers eux et il est sûr que nous y serons de plus en plus nombreux. Temps de pose – par le Théâtre de la Démesure
Théâtre Berthelot – Montreuil-sous-Bois – du 16 au 19 octobre 2013